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L'eau du sous-sol et les sources

Mes thèmes de recherche

En tant que géologue, je travaille sur l’hydrothermalisme ancien (hercynien) et ses liens avec les ressources en eau en domaine de socle, c’est-à-dire là où la roche dite “de socle”, comme le granite, affleure à la surface. Je participe au conseil scientifique du Parc Naturel Régional du Morvan depuis 5 ans et au Laboratoire forestier de Bibracte, ce qui m’a amené à collaborer au projet de recherche COUDRIER.

La formation des hydro-géosystèmes anciens ou récents, c’est-à-dire la configuration des roches dans lesquelles circule l’eau dans le sous-sol, est gouvernée par les interactions entre la déformation de ce sous-sol, la circulation de différents fluides et les réactions dites “hydrothermales”, c’est-à-dire issues de la rencontre entre les roches et l’eau dans certaines conditions de pression, d’acidité et de température. Cependant, peu d’outils existent aujourd’hui pour reconstituer cette “hydrodynamique” ancienne (datant du paléolithique), alors qu’il semble évident que les interactions des fluides dans le sous-sol et leurs conséquences sur l’évolution pétrophysique des roches hydrothermalisées (c’est-à-dire les propriétés physiques de roches ayant subi des réactions hydrothermales) sont un facteur majeur de la circulation actuelle de l’eau dans le sous-sol.

Mes travaux de thèse et de post-doctorat ont permis de montrer que les directions d’écoulement de fluides sont comme “fossilisées” dans les textures minérales par les brisures de symétrie des formes des cristaux (Sizaret et al., 2006). Analyser ces textures minérales dans le sol permet de comprendre dans quelles directions et à quelles vitesses un fluide s’est écoulé entre les grains de ces minéraux. Les études, réalisées principalement sur des tourmalines* associées à des minéralisations dites “Sn-W”* d’âge varisque (la chaîne varisque, appelée chaîne hercynienne* en France, est la grande chaîne de montagnes qui se forme du Dévonien supérieur au Carbonifère supérieur (soit entre -360 et -300 millions d’années) suggèrent que le fonctionnement des systèmes hydrothermaux n’est pas continu dans le temps, mais marqué par des périodes de fortes vitesses d’écoulement de fluides.

Une conséquence de l'altération hydrothermale de la roche est la localisation des écoulements par la modification de la perméabilité et de la rhéologie* de ces roches. C’est particulièrement le cas pour les altérations de types “greisen”*, qui sont une transformation des feldspaths* des roches en muscovite* par des fluides chauds et acides. J’ai encadré plusieurs travaux de thèse sur cette question qui ont permis plusieurs avancées (e. g. El Mahjoub Mahjoubi et al., 2016; Launay et al., 2018 et 2019; Fort, 2023). 

In fine, l’enjeu est important, car il s’agit d’être capable de mieux comprendre la dynamique des systèmes hydrothermaux afin d’aborder les questions de superposition et d’enrichissement lors des différents stades hydrothermaux. Les résultats, s’ils se confirment, permettront le développement de modèles quantitatifs pour prédire la localisation des minéralisations à grande profondeur.

Les applications dans le Morvan autour des enjeux de l’eau

L’intérêt est de développer et transmettre des connaissances dans une région du domaine varisque qui a été peu épaissie lors de la collision continentale et dont les roches témoignent des domaines superficiels de la chaîne. D’un point de vue scientifique, les terrains du Morvan témoignent du volcanisme contemporain des granites associés aux minéralisations à Sn-W*. Ces paléo-géométries de surface sont importantes à identifier, car elles influencent les circulations de fluides à grande échelle. Des recherches de terrain sont en cours sur des événements hydrothermaux atypiques et peu documentés, qui seront prolongés dans le cadre du programme PEPR Sous-sol où j’anime des travaux sur un axe Brévenne-Morvan.

Ces études, qui prennent l’exemple des systèmes magmatiques hydrothermaux du Morvan, ont permis d’ouvrir un nouveau champ d’application. Là où les roches “de socle” affleurent, comme dans le Morvan avec le granite, les modèles hydrogéologiques classiques considèrent que l’eau est stockée entre le sol et la roche altérée. Ce niveau superficiel de roche altérée est appelé “régolithe”*. Il contient une quantité limitée d’eau et est susceptible d’être érodé, réduisant encore les capacités de stockage. Dans la région du Haut Morvan, la pression sur l’eau est devenue une question sociale très sensible en période d'étiage. Or, les sources montrent des comportements variables et les études de terrain suggèrent que les sources associées à des formations de type “greisen”* restent pérennes en cas de forte sécheresse. Les altérations hydrothermales anciennes, héritées d’un lointain passé géologique, peuvent donc constituer des aquifères d’intérêt local ou régional.

Ma participation au projet COUDRIER a pour objectif de suivre l’évolution de différentes sources dans la région du Haut Morvan, d’affiner les modèles conceptuels d’aquifère de socle et de tester la possibilité d’avoir localement des stocks significatifs d’eau permettant une meilleure résilience des écosystèmes et une meilleure gestion des surfaces forestières.

Complétez mes recherches en participant vous aussi au suivi des eaux du sous-sol et des sources près de chez vous ! Deux tutoriels vous sont proposés ci-dessous pour vous y aider.

* Voir le glossaire.

Qui suis-je ?

Stanislas Sizaret

Géologue et Professeur à l’Institut de la Terre de l’Université d’Orléans

Spécialiste de la géologie des gisements et de la dynamique des systèmes hydrothermaux.

Comment faire ?

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